Ana de Armas est extraordinaire en Marilyn Monroe, mais le film d’Andrew Dominik (prochainement sur Netflix) est un tourbillon tragique qui retrace le drame, l’humiliation et la violence subis par la femme la plus photographiée au monde.
Dans une séquence mémorable du dernier film de James Bond, « Mourir peut attendre », Ana de Armas incarne une espionne qui s’associe à l’agent 007. Dans « Blonde » (disponible sur Netflix à partir du 28 septembre), un film d’Andrew Dominik, le actrice incarne une icône, une légende, Marilyn Monroe. La brune Latina s’est transformée en blonde aux yeux bleus, imitant le regard, les gestes, la voix, de la plus célèbre des blondes.
Présenté en avant-première au Festival du cinéma américain de Deauville, où Ana de Armas a reçu un Hollywood Rising Star Award et où Andrew Dominik a présenté son western « L’Assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford », « Blonde » n’est pas un biopic classique, c’est une fiction loin de l’image glamour de la star souriante d’Hollywood, un véritable roman noir qui retrace les drames, humiliations et violences subis par la femme la plus photographiée au monde.
Plus que Marilyn, c’est Norma Jeane Baker (de son vrai nom) qu’Ana de Armas incarne dans cette adaptation du livre de Joyce Carol Oates : « Je suis l’esclave de cette Marilyn Monroe (…) Ce n’est pas moi, je ne suis pas une star, je ne suis qu’une blonde », explique l’actrice. Marilyn a beaucoup souri, Norma Jeane a beaucoup pleuré. Norma Jeane ne veut plus jouer Marilyn, une créature qui n’existe qu’à l’écran pour 500 dollars par semaine. Le film insiste sur ce grand malentendu, cet écart irréconciliable entre l’image de cette blonde et ce qu’elle est vraiment, intimement.
Reconstitutions troublantes
Tout d’abord un enfant mal aimé de sa mère alcoolique, névrosée et finalement institutionnalisée (Julianne Nicholson), placée dans un orphelinat, rejetée, traumatisée, abandonnée par son père qu’elle cherchera toujours (appelant les hommes de sa vie « papa ») . Une épouse mal aimée de ses maris, le champion Joe DiMaggio (Bobby Cannavale) et l’écrivain Arthur Miller (Adrian Brody). Une femme humiliée, exploitée, battue, violée, maltraitée y compris dans une séquence ridicule avec John Fitzgerald Kennedy.
Tournant parfois dans les lieux mêmes où elle a vécu, Andrew Dominik a reconstitué, à l’identique et dérangeante, des images célèbres, des séquences connues de tous, la voiture de « Certains l’aiment chaud », les escaliers de « Les hommes préfèrent les blondes », les tournage de « Seven Years of Reflection », avec la mythique robe blanche s’élevant au-dessus d’une bouche de métro.
Ana de Armas est une présence exceptionnelle dans la peau de cette « Blonde », un film très « fabriqué », avec de nombreux effets de réalisation, une alternance de séquences en couleur et d’images en noir et blanc, la musique élégante de Nick Cave et Warren Ellis, une narration éclatée pour respecter « le caractère hallucinatoire du roman ». Mais ce film est une histoire d’une grande tristesse, un tourbillon tragique et pitoyable, une accumulation pathétique des nombreux malheurs de Marilyn, de sa vie douloureuse et drôle, à tel point qu’on en est finalement étourdi. Et hanté par la dernière image, une femme morte sur son lit, en août 1962.
Patrick TARDIT
« Blonde », un film d’Andrew Dominik, avec Ana de Armas (disponible sur Netflix à partir du 28 septembre).
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