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Des tranchées, des champs de mines et des fortifications pour briser l’élan des blindés : l’armée russe multiplie les lignes de défense en prévision de la contre-offensive ukrainienne. Ces fortifications sont apparues ces derniers mois sur toute la ligne de front, mais également en Crimée, la péninsule annexée par la Russie en 2014.
Ce sont des images satellites publiées par le Poste de Washington qui ont permis de documenter précisément ces nouvelles lignes de défense, bâties au cours des dernières semaines par l’armée russe. Il s’agit principalement de tranchées et de « dents de dragon », des blocs de béton et d’acier posés sur le sol afin de freiner les assauts des blindés. Selon les images publiées par le journal, qui lui ont été fournies par Maxar, une compagnie satellitaire américaine, deux secteurs ont été fortifiés en priorité : les environs de Medvedivka, près de l’un des deux points de passage entre l’Ukraine continentale et la péninsule occupée, et ceux de Vitino, sur la côte occidentale de la Crimée.
Les tranchées ont été creusées en quelques semaines, avec l’aide notamment des fameux « BTM-3 », des engins de conception soviétiques qui opèrent en un temps record, 800 mètres par heure, même sur un sol pris par le gel. « Sans surprise, ces lignes de défense se concentrent sur la bande de terre qui repose sur la Crimée à l’Ukraine et sur le littoral occidental, notamment sur les plages situées au nord d’Eupatoria, où un débarquement est envisageable », note l’historien Martin Motte, de l’Institut de stratégie comparée.
« Donc, c’est l’idée qu’il pourrait y avoir une menace d’assaut de la Crimée à la fois par la terre et par une opération amphibie. Ce scénario classique est celui de la plupart des historiques précédents : la conquête de la péninsule par les Russes contre les Tatars, au XVIIIe siècle, la prise du territoire par les Bolchéviques lors de la guerre civile, en 1919, et la reconquête soviétique au cours de la Seconde Guerre mondiale. Seule exception, l’assaut allemand en 1941 qui s’était fait uniquement par voie terrestre. »
Isthme de Perekop
Si la Russie renforce ses lignes de défense en Crimée, c’est qu’elle prend au sérieux l’hypothèse d’un assaut ukrainien sur la péninsule. Un scénario que de nombreux experts jugeaient cependant peu probable – étant donné les capacités limitées de l’armée ukrainienne étant et les difficultés immenses présentées par une telle opération. « L’entrée sur la péninsule se fait par l’isthme de Perekop, un bras de terre d’environ 5 à 7 kilomètres de longrappelle Martin Motte. Ensuite, vous abordez une zone dans laquelle vous avez énormément de lacs et de marécages, et qui est donc très facile à défendre. Enfin, s’ils veulent tenter un débarquement par les plages, les Ukrainiens auront besoin de la maîtrise de la mer. Et ils n’ont plus de marine, seulement des vedettes fournies par les Américains. Celles-ci peuvent certes leur permettre de mener des opérations de commando, mais sans doute pas de mener un débarquement de grande ampleur. »
Pas sûr que l’Ukraine ait les moyens de mener une telle offensive – même sans évoquer la Crimée -, les documents du Pentagone qui ont fuité sur les réseaux sociaux montrent d’ailleurs que les services américains doutent des capacités des forces ukrainiennes à mener une contre-offensive en profondeur. Et ils s’inquiètent en outre des lignes de fortification définies par les Russes, qui pourraient poser de sérieux problèmes aux assaillants.
« Couper » le dispositif russe
Pourtant, les dirigeants ukrainiens répètent inlassablement qu’ils reprendront la Crimée, et ce, par tous les moyens : « Tout a commencé par la Crimée, tout se terminera par elle », martèle ainsi le président ukrainien, Volodymyr Zelensky. Et c’est un sujet très sensible, car les alliés de l’Ukraine s’inquiètent non seulement des difficultés stratégiques d’un tel scénario, mais surtout de la réaction de la Russie en cas d’attaque sur ce territoire. Dans l’entourage de Vladimir Poutine, on n’exclut pas l’utilisation de l’armée nucléaire pour défendre la Crimée, c’est le sens des déclarations récentes de l’ancien président russe Dmitri Medvedev.
De nombreux experts ont estimé donc qu’un scénario plus probable et plus « raisonnable » serait pour l’Ukraine de rendre la présence russe en Crimée intenable, en multipliant les frappes et les actions de sabotage, sans tenter pour autant de reprendre le territoire par la force. L’objectif stratégique majeur de la contre-offensive ukrainienne serait alors de « couper » le corridor terrestre qui permet de relier la Crimée au Donbass, en s’emparant des villes de Melitopol et de Berdiansk. Pour soutenir les troupes stationnées dans la péninsule, la Russie n’aura alors que le pont de Kertch, qui a déjà été la cible d’une attaque en octobre dernier et qui pourrait donc devenir le point le plus vulnérable du dispositif russe dans la région.
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